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Le mois dernier, le journal Le Monde s'est procuré la version non définitive d'un rapport du Haut-commissariat aux droits de l'homme de l'ONU (HCDH) détaillant les exactions commises en République Démocratique du Congo (RDC) entre 1993 et 2003. Le document évoque le mot «génocide» et met en cause la responsabilité du Rwanda. L'Histoire de la RDC n'est pas un long fleuve tranquille. Depuis 1998, 5,4 millions de personnes auraient été tuées au cours des multiples conflits dont le pays a été le théâtre. Exécutions, viols de masse, pillages sont le lot quotidien des habitants depuis presque vingt ans.
Ce rapport se penche sur la pire décennie, quand la RDC est une victime collatérale du génocide qui se déroule au Rwanda. En 1994, craignant des représailles de la part des Tutsis, plus d'un million de Hutu fuient le Rwanda et se réfugient au Zaïre (future RDC), où ils s'entassent dans des camps de réfugiés. Ces camps sont alors la cible de raids menés par l'Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL) de Laurent-Désiré Kabila, futur président du pays. Cette alliance n'est pas l'armée officielle mais une rébellion "dont les troupes, l'armement et la logistique sont fournis par le Rwanda", comme le précise le rapport. Ce document ne va donc pas encore faire les affaires de Paul Kagamé puisqu'il fournit de nombreux exemples de «crimes contre l'humanité» et «crimes de guerre» perpétrés par AFDL et l'armée controlée par le président rwandais.
Peut-on alors parler de génocide des Hutus ? Le HCDH ne tranche pas mais évoque la possibilité d'une telle qualification : «Les attaques systématiques et généralisées (contre des Hutu) révèlent plusieurs éléments accablants qui, s'ils sont prouvés devant un tribunal compétent, pourraient être qualifiés de génocide». Gloups ! L'objectif du rapport est évidemment de servir de base à d'éventuels procès. Ce qui n'est pas du goût de tout le monde, notamment Paul Kagamé qui aurait menacé directement le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, d'arrêter la participation du Rwanda aux opérations de maintien de la paix de l'ONU si le rapport était publié. Du côté de l'ONU, on lâche déjà du lest car le Rwanda est l'un des plus gros contributeurs de la mission établie au Darfour -3550 soldats rwandais présents sous couleur de l'ONU au Darfour. De son côté, Ban Ki-moon met en garde contre l'utilisation du mot «génocide» dans la version finale du rapport... Comme par hasard ! La version définitive sera publiée «très rapidement», reste à savoir si le terme «génocide» y figurera...
Parallèlement à ça, je viens également de lire un article très intéressant sur le mea culpa des Nations Unies pour des viols au Congo. Plus de 500 viols ont été perpétrés dans une localité de la région du Kivu, proche d'une base des Casques bleus. Les mots d'Atul Khare, l'un des responsables de l'ONU chargé du maintien de la paix dans la région ont été les suivants : "Nous avons clairement échoué. Nos actions ont été insuffisantes (...). Nous devons faire mieux." De quoi s'énerver quand on sait qu'à la fin Juillet, les casques Bleus sont restés passifs face aux rebelles des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) - la plupart sont des Hutus - qui ont attaqué 13 villages isolés. Même protocole pendant 3 jours. Les rebelles arrivent à la nuit tombante et sèment la terreur. Ils volent et pillent sans retenue. Mais surtout, ils frappent et violent. Dans le village de Luvingi, toutes les femmes (à partir de 13 ans) qui étaient présentes ce jour-là au village ont été violées. Abandonnées par leurs pères ou maris obligés de fuir dans la forêt pour avoir la vie sauve, les victimes n'ont eu aucune chance d'en réchapper. Soit plus de 280 femmes abusées ce jour-là. Pas la moindre résistance, ils ont pu prendre leur temps malgré le fait que Luvingi ne se trouvent qu'à 30 kilomètres d'une base de soldats de l'ONU, dont le rôle premier est en théorie de protéger les civils. Les Casques bleus eux, mettront deux semaines à rendre compte des exactions...
Mes premiers réflexes ont été l'énervement et la colère. Même si l'ONU reconnait sa faute, l'ONU refuse cependant d'endosser l'entière responsabilité du drame. Il est vrai que l'armée du gouvernement congolais ne fait pas mieux... Derrière ceci, il y a le contrôle de la région et notamment la mine de cassitérite de la région du Kivu. Une éventuelle solution à la situation explosive de la région pourrait se trouver grâce au puissant voisin rwandais. Mais, comme vous le savez déjà, les relations entre le Rwanda et l'ONU sont quelque peu tendues en ce moment...
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