samedi 30 août 2014

"En finir avec Eddy Bellegueule" d’Édouard Louis

Je continue les lectures que ma mère m'a offertes à mon anniversaire avec "En finir avec Eddy Bellegueule" d’Edouard Louis.


Ce livre de genre autobiographique est le premier roman d'Édouard Louis. Il raconte l'enfance et l'adolescence d'Eddy Bellegueule dans un village de Picardie. Élevé dans une famille ouvrière, Eddy ne ressemble pas aux autres enfants à cause de sa manière de se tenir, son élocution et sa délicatesse qui lui valent de nombreuses humiliations et injures, tant par ses camarades de classe que par son père alcoolique et sa mère revêche. Dans le milieu où il vit, on n'aime pas les "pédés".

Ce livre est une œuvre qui pourrait s'avérer majeure dans les prochaines années. Y est dépeint un univers où la misère sociale amène de nombreux jeunes à un standard. Les femmes deviennent caissières après avoir abandonné leurs études et les hommes passent de l'école à l'usine. Le roman aborde la reproduction sociale mais aussi sexuelle. Eddy a conscience de son attirance sexuelle pour les hommes mais essaie de rentrer dans la norme. Devant le constat de son échec, il décide alors de fuir pour essayer de tracer son propre chemin.

J'ai beaucoup aimé ce récit autobiographique - surtout après les longs débats sur le mariage pour tous - car il pose des questions importantes et essentielles : la persécution ne vient-elle pas du conditionnement social ? Comment chaque être peut-il inventer sa liberté ? Tout le talent d'Édouard Louis est de dresser un tableau saisissant et réaliste d'une partie de la population française. L'auteur ne juge pas, il décrit si simplement les choses que cela en est encore plus frappant. Pour illustrer au combien ce livre est magnifique est beau et puissant, il suffit d'en lire les premières lignes.

De mon enfance, je n’ai aucun souvenir heureux. Je ne veux pas dire que jamais, durant ces années, je n’ai pas éprouvé de sentiment de bonheur ou de joie. Simplement la souffrance est totalitaire : tout ce qui n’entre pas dans son système, elle le fait disparaître.
D'autres morceaux choisis que je partage avec vous.

Je me rappelle cette dispute avec la précision des évènements que l’on crée dans sa vie à partir de souvenirs qui auraient pu être insignifiants, banals. Et puis, des mois, des années après, selon ce que l’on devient, ils prennent du sens.

Je me souviens encore moins du lait encore tiède parce qu’il venait d’être extrait des pis des vaches et que ma mère allait le chercher à la ferme en face de chez nous que des soirs ou la nourriture manquait et ou ma mère disait cette phrase « Ce soir on mange du lait », néologisme de la misère.

Il fallait fuir. Mais d’abord on ne pense pas spontanément à la fuite parce qu’on ignore qu’il existe un ailleurs. On ne sait pas que la fuite est une possibilité.

Le fait d’aimer les garçons transformait l’ensemble de mon rapport au monde, me poussait à m’identifier à des valeurs qui n’étaient pas celles de ma famille.

Aucun commentaire: