jeudi 22 mai 2014

"A la recherche du temps perdu" de Marcel Proust

Oui, mes lectures sont à l'image de ma vie... Je cours après le temps perdu mais je n'ai de doute que j'arriverai a rattraper le retard de mon blog ! :-) J'ai donc repris mes lectures dites classiques avec l'œuvre de Marcel Proust "À la recherche du temps perdu" qui est un roman écrit en sept tomes. Oui, encore mieux que "Guerre et Paix" de Leo Tolstoy ! J'ai donc commencé avec Du côté de chez Swann, le premier volume du roman.


Je savais que ma lecture serait fastidieuse et je n'ai pas été déçu ! Lorsque vous commencez le roman, vous savez que vous avez affaire à de la "vraie" littérature et que Marcel Proust est un excellent écrivain. J'ai été un peu décontenancé avec des mots comme métempsycose (le transvasement d'une âme dans un autre corps qu'elle va animer), mais je me suis rapidement plongé dans les réflexions de l'auteur. En effet, plutôt que le récit autobiographique d'une séquence d'événements, le roman de Marcel Proust s'intéresse pas aux souvenirs du narrateur mais fait une réflexion plus large sur la littérature, sur la mémoire, sur le temps et bien sur l'amour ! Si vous voulez, le narrateur aborde un souvenir et c'est prétexte à discuter, philosopher et s'interroger. Il y a ainsi des passages qui, un siècle après, prennent encore plus signification. Morceaux choisis.

Notre personnalité sociale est une création de la pensée des autres.

Elle tira de cette contrainte même une pensée délicate de plus, comme les bons poètes que la tyrannie de la rime force à trouver leurs plus grandes beautés.

Ma grand’mère, ai-je su depuis, avait d’abord choisi les poésies de Musset, un volume de Rousseau et Indiana ; car si elle jugeait les lectures futiles aussi malsaines que les bonbons et les pâtisseries, elle ne pensait pas que les grands souffles du génie eussent sur l’esprit même d’un enfant une influence plus dangereuse et moins vivifiante que sur son corps le grand air et le vent du large.

(…) elle ne se résignait jamais à rien acheter dont on ne put tirer un profit intellectuel, et surtout celui que nous procurent les belles choses en nus apprenant à chercher notre plaisir ailleurs que dans les satisfactions du bien-être et de la vanité.

Et tout d’un coup le souvenir m’est apparu. Ce goût celui du petit morceau de madeleine que le dimanche matin à Combray (parce que ce jour-là je ne sortais pas avant l’heure de la messe), quand j’allais lui dire bonjour dans sa chambre, ma tante Léonie m’offrait après l’avoir trempé dans son infusion de thé ou de tilleul.

Les femmes qui prétendent ne juger un homme que sur son physique, voient en ce physique l’émanation d’une vie spéciale. C’est pourquoi elles aiment les militaires, les pompiers : l’uniforme les rend moins difficiles pour le visage : elles croient baiser sous la cuirasse un cœur différent, aventureux et doux.

Les faits ne pénètrent pas dans le monde où vivent nos croyances, ils n’ont pas fait naitre celles-ci, ils ne les détruisent pas ; ils peuvent leur infliger les plus constants démentis sans les affaiblir, et une avalanche de malheurs ou de maladies se succédant sans interruption dans une famille, ne le fera pas douter de la bonté de son Dieu ou du talent de son médecin.

Tous ces souvenirs ajoutés les uns aux autres ne formaient plus qu’une masse, mais non sans qu’on put distinguer entre eux, - entre les plus anciens, et ceux plus récents, nés d’un parfum, puis ceux qui n’étaient que les souvenirs d’une autre personne de qui je les avais appris – sinon des fissures, des failles véritables, du moins ces veinures, ces bigarrures de coloration, qui dans certaines roches, dans certains marbres, révèlent des différences d’origine, d’âge, de « formation ».

(…) à l’âge déjà un peu désabusé dont approchait Swann et où l’on sait se contenter d’être amoureux pour le plaisir de l’être sans trop exiger de réciprocité.

Il était convenu qu’on est intelligent dans la mesure où on doute de tout et où on ne trouvait de réel et d’incontestable que les goûts de chacun.

On ne connait pas son bonheur. On n’est jamais aussi malheureux qu’on croit.

Les mots nous présentent des choses une petite image claire et usuelle comme celles que l’on suspend aux murs des écoles pour donner aux enfants l’exemple de ce qu’est un établi, un oiseau, une fourmilière.

Les lieux que nous avons connus n’appartiennent pas qu’au monde de l’espace où nous les situons pour plus de facilité. Ils n’étaient qu’une mince tranche au milieu d’impressions contiguës qui formaient notre vie d’alors ; le souvenir d’une certaine image n’est que le regret d’un certain instant ; et les maisons, les routes, les avenues, sont fugitives, hélas, comme les années.

C'est magnifiquement écrit et cela nous amène à de profondes réflexions et parfois à nos propres souvenirs. Je suis sûr que ma sœur et mon frère reconnaitront ce même souvenir à la lecture de ce passage.

Fauteuils en velours frappé, toujours revêtus d’un appui-tête au crochet.

La lecture de ce premier tome de "A la recherche du temps perdu", je dois vous l'avouer, a été très fastidieuse. J'en retiens de très bons passages mais cela m'a fait longuement hésité à lire les 6 autres tomes. Je me lancerai dans la lecture du suivant. Les mots de l'auteur m'en ont convaincu !
 
Nous sommes très longs à reconnaître dans la physionomie particulière d’un nouvel écrivain le modèle qui porte le nom de « grand talent » dans notre musée des idées générales. Justement parce que cette physionomie est nouvelle nous ne la trouvons pas tout à fait ressemblante à ce que nous appelons talent. Nous disons plutôt originalité, charme, délicatesse, force ; et puis un jour nous nous rendons compte que c’est justement tout cela le talent.

Ce que je reproche aux journaux c’est de nous faire faire attention tous les jours à des choses insignifiantes tandis que nous lisons trois ou quatre fois dans notre vie les livres où il y a des choses essentielles.

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